Lettre de Harmonie à Nicolas Ier

Publié le par Etarcos

Je ne résiste pas à l'envie de publier la lettre de Harmonie à notre "cher" président. Dans celle-ci, elle corrige les erreurs historiques du discours, met les points sur les "i" et s'inquiète légitimement de la perception de la laïcité par le président. Elle est bien cette lettre, j'aurais aimé écrire la même !

"Monsieur le Président de la République française, 

Ayant lu avec attention votre allocution du 20 décembre 2007 (dans la salle de la signature du palais du Latran), je me suis sentie obligée de vous écrire. 
En effet, votre discours contient un certain nombre d’erreurs que je ne peux m’empêcher de porter à votre connaissance.

Vous reconnaissez le "lien si particulier qui a si longtemps uni notre nation à l'Eglise". En français, une Eglise désigne une communauté chrétienne, c’est-à-dire aussi bien catholique, que protestante ou orthodoxe, il aurait donc été judicieux de préciser votre pensée. L’emploi du singulier « Eglise » sans précision me semble indiquer un jugement de valeur. 

Plus loin vous dîtes « Saint-Jean-de-Latran "la tête et la mère de toutes les églises de Rome et du monde" ». Selon le dogme catholique, uniquement, Monsieur le Président, et tous les Français ne sont pas catholiques.

Ensuite la France n’a pas reçu le titre de « fille aînée de l’Eglise » à la suite du baptême de Clovis mais lorsque Pépin le Bref donna les terres des Lombards au Pape.

De plus, Clovis n’était pas le premier souverain chrétien puisque les empereurs de Constantinople l’étaient déjà.

J’ai été déçue que vous mettiez autant en avant l’apport du catholicisme dans l’Histoire de France sans même évoquer l’apport du judaïsme, du protestantisme, des autres opinions portées par les Lumières, et plus récemment de l’Islam, qui ont pourtant aussi marqué la France.

« Tout autant que le baptême de Clovis, la laïcité est un fait incontournable dans notre pays ». La laïcité est effectivement un fait incontournable, mais je ne vois pas en quoi un fait historique lointain compte autant qu’une loi de la République en vigueur.

Vous reconnaissez à juste titre les souffrances que la loi de 1905 a pu occasionner. Mais vous avez oublié de mentionner les souffrances que cette loi a permis d’éviter. Souvenez-vous du chevalier de la Barre, condamné à mort pour blasphème…

« La laïcité n’a pas le pouvoir de couper la France de ses racines chrétiennes. Elle a tenté de le faire. ». La laïcité n’a jamais tenté de couper la France de ses racines. Vous faites sans doute référence au laïcisme, qui est l’intégrisme laïc. Il est toujours dangereux d’amalgamer une opinion avec l’intégrisme découlant de cette opinion.

Effectivement la morale laïque ne répond pas aux questions existentielles, mais ce n’est pas son rôle. Elle laisse, et doit laisser, la liberté à chacun de trouver ses propres réponses à ces questions, par le biais du religieux, s’il le souhaite, mais sans jamais lui imposer une réponse.

« La République laïque a sous-estimé l'importance de l'aspiration spirituelle ». Non, elle a simplement reconnu que l'aspiration spirituelle ne la concernait pas.

Sur quoi vous basez-vous, Monsieur le Président, pour affirmer que les banlieues sont « un désert spirituel » ? Etant moi-même « banlieusarde », je puis vous affirmer que ma banlieue ne souffre pas « d'un désert spirituel », mais qu’elle souffre d'un manque de reconnaissance républicain.

Vous souhaitez « l’avènement d’une laïcité positive ». Existerait-il une laïcité négative ?

Ne manquant ni de générosité, ni de courage ni d’espérance, je vous demande, Monsieur le Président, si vous avez l’intention de rectifier ces erreurs auprès du grand public et, si oui, par quels moyens.

Dans l’attente de votre réponse, recevez mes salutations respectueuses."


Publié le dimanche 3 février 2007 sur le blog de Harmonie : Sapientia amanda est.
Reproduit avec son autorisation.

Publié dans Points de vue

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